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SAINTE-SYLVIA DE BONDY, 93
CHRISTIAN LACHENAL
Isbn: 9791096559152
Date de publication: 19 novembre 2025
Dimensions: 14 x 21 cm
Poids: 431. Gr
Langue: Français
Nombre de page: 330
Catégorie: FICTION
Maman est un métier difficile.
Encore plus quand on a un enfant avec des pouvoirs étranges...
Et des amies lunaires.
Et que le père n'existe pas. Enfin, pas comme on l'imagine.
Et qu'on est tous embarqués dans une aventure hors normes.
Comme d'habitude, Sylvia, débrouille-toi avec ça.
Et accroche-toi...
Christian Lachenal est un scénariste, auteur et musicien français, actif dans les domaines de la télévision, de la bande dessinée et de la production musicale. Il a collaboré à plusieurs séries télévisées, notamment "Détectives" et "Camping Paradis"
En bande dessinée, il a coécrit "La Fée Annan" avec Gihef, illustré par Alberto Zanon, publié aux Éditions Les Humanoïdes Associés
En tant que réalisateur musical, il a travaillé sur environ 60 albums, collaborant avec des artistes tels que Touré Kunda, Ismaël Lô, Coumba Gawlo, Angélique Kidjo et Youssou N'Dour. Il est également membre fondateur du studio "Le Chantier", un espace partagé par un collectif de musiciens, réalisateurs et compositeurs
Quand j’entre dans sa chambre, il est debout sur le rebord de la fenêtre. Corcovado, les bras tendus, quatorzième étage au-dessus de Bondy, 93140. T’es trop à fleur de peau, Sylvia, on me le dit souvent, les copines, Maman, ma coach du club de respiration pelvienne mais là je sens mon sang, mes boyaux, mon cœur dégringoler sur la moquette et mes ovaires auraient suivi le même chemin si j’en avais encore. Dans le silence épais, je m’approche, en apnée. Je vieillis de vingt ans le temps de traverser la chambre – je l’imagine plonger, mes mains ratant ses pieds de quelques millimètres – et je l’agrippe tellement fort que je manque de basculer avec lui douze étages plus bas. On aurait défilé enlacés devant les fenêtres, laissant une traînée de comète dans les yeux des voisins qu’en temps normal on croise dans l’ascenseur, on aurait percuté le sol à 195 km/h avec un bruit d’éponge, les médias auraient vendu leur salade, une mère se jette dans le vide avec son enfant, drame de la misère sociale.
« Maman, tu me fais mal ! » dit Lucas d’une voix neutre. Je respire, enfin. Mes aisselles dégoulinent d’une sueur acide, je vois mes ongles incrustés dans ses cuisses et, bien plus bas sur le mail, le bus 46 démarrer de l’arrêt. Alors je le repose sur la moquette et je lui flanque une baffe. Voilà, réflexe animal. J’ai plus mal que lui, de honte, ma main comme un fer à cheval au bout de mon bras, un goût de vomi au fond de la gorge. Je referme la fenêtre et les jambes en guimauve, je m’assois sur son lit. Tout à coup, c’est moi l’enfant dans le labyrinthe de la vie compliquée. Il me jette un regard stupéfait, je ne l’avais jamais frappé avant, à part peut-être il y a bien longtemps quelques petites tapes sur les couches pour le remettre dans la voie, on ne peut pas appeler ça de la maltraitance. Il passe une main hésitante sur sa joue rougie. Mâchoires serrées, il ravale ses larmes. « Tout’ manière, je s’rais pas tombé. Tu sais très bien pourquoi » lâche-t-il entre ses dents.
Je ne fais pas ma tête de madone constipée. Je ne dis rien. Ce n’est pas le moment de remettre ça sur le tapis. Mais je réalise d’un bloc que j’ai un putain de problème et que plus rien ne sera comme avant.