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PAGNOLITE EDITORIALE
Si vous avez déjà un nom, mais un talent de plume quelconque, bombardez la sphère éditoriale avec les histoires de votre clan. Les éditeurs vous dérouleront le tapis rouge ! Ainsi, l’actrice Isabelle Carré nous raconte sa famille dans Rêveurs, portrait déguisé en roman ; Philippe Labro nous narre sa génitrice dans Ma mère, cette inconnue ; Jérôme Garcin évoque son frère dans Olivier ; Mazarine Pingeot râbache son père (Mitterrand) à son possible enfant à venir dans Bouche cousue ; Catherine Locandro fait ressurgir sa sœur dans… Sœurs ; Daniel Pennac nous bassine avec Mon frère ; Alexandre jardin nous fait la totale avec Le Zubial (le père), Des gens très bien (le grand-père), Ma mère avait raison (on a compris…) ; Michel Onfray nous inflige ses deux parents dans deux bouquins, Le corps de mon père et Autobiographie de ma mère, dans lesquels il parle aussi beaucoup de lui-même : son enfance, son adolescence… On espère maintenant le récit détaillé de sa sénescence ; Roselyne Bachelot nous relate l’histoire de sa grand-mère dans Corentine ; Régis Jauffret s'épanche sur son père "inexistant" dans Papa...
Tous atteints de la Pagnolite* !
Nous voilà donc avec toutes ces vies et toutes ces personnes qui ne nous sont rien et dont, franchement, on n’a rien à ...
Mais tous ces consanguins, qu’ont-ils de plus que les vôtres ?
Pourquoi les plus grands éditeurs publient-ils ces chroniques finalement très autocentrées ?Et pourquoi ne prennent-ils pas les textes de Madame Dugenou ou de Monsieur Bidulon, dont les parents et les fratries ont eu des destins fabuleux et qu’ils exposent avec brio dans leurs manuscrits – tous refusés par les comités de lecture ?
Eh bien tout simplement parce qu’ils ne sont pas connus. Voilà.
Aux yeux des éditeurs et des médias, une célébrité, quel que soit son talent, vaut mieux qu’un quidam qui a une vraie bio à offrir. L’important, c’est d’avoir une renommée et un cageot de parents à disposition. Car, voyez-vous, s’épancher sur sa famille va intéresser le public puisque c’est celle d’une célébrité. Forcément.
T’es connu, tu publies n’importe quoi, et tes ascendants ou collatéraux font de parfaits ersatz de sujets. Pépé et Mémé bouchent les trous d’une imagination défectueuse. Ton frangin va tirer des larmes au lecteur lambda, du moins le crois-tu. Ta môman accède aux honneurs nationaux !
Maintenant, on attend qu’ils nous propulsent leurs cousins dans la gueule…
* Allusion à l’auteur de La gloire de mon père et Le château de ma mère.
KURT TIDMORE JAZZ & LITERATURE
Ireland-based American writer and jazz player brings whiffs of Texas into the Parisian literary landscape
He loves and plays jazz, which inspired the title of one of his 9 stories, based on the jazz standard All the Things you Are. The other 8 stories completing the newly released book published in Paris this month are anchored in the American psyche, delving into the deepest soul of ordinary people who have to come to terms with their unfortunate fates.
AMAZON OU LIBRAIRIES ?
Notre modeste maison, comme tant d'autres, ne peut évoluer que par sa coopération avec les librairies, lesquelles, déjà submergées par l'inflation éditoriale, ont bien du mal à survivre au regard de la baisse du "grand lectorat"... Des villes sans librairies, quelle tristesse. Les voir fermer au profit de boutiques de téléphonie ou de prêt-à-porter est un crève-coeur.
Pour nous, éditeurs, la diffusion est vitale afin d'exister auprès des libraires. Sans diffuseur, l'entrée sur les présentoirs est improbable. Reste alors la vente en-ligne. Mais comment éviter d'engraisser davantage encore l'ogre Amazon? Ce n'est pas notre souhait. Et hormis nos versions numériques, soumises à ce marché, nous voulons vendre des écrits sous forme d'ouvrages, pas des marchandises gérées par des algorithmes.
Notre préférence va donc à la vente en librairie. Je lance un appel aux libraires de bonne volonté qui voudront bien accueillir nos publications pour que nous n'allions pas nous jeter dans les griffes des prédateurs d'internet. Pour que les librairies continuent à être les lieux privilégiés de tous ceux et celles qui aiment les bouquins avec des idées, des émotions, bref, de la littérature.
La place de nos livres est chez vous, ô libraires. Et le moins possible chez Amazon.
Jean Quesneville
I'M GOOD !
"How are you?"
"I'm good."
What kind of language is that? Someone asks you how you are — and you answer how good you are. How pretentious! Shouldn't you say : "I'm well" or "I'm fine"? Because, you may be well but not good and the other way around.
Americans have been betraying their own language for a while, thinking that speaking correct language didn't matter. It has brought America to the acme of civilization : "Hi ! Yeah ! Okay ! Y’know… like… I mean… Y’know !" Here is the report of an interview with young American musicians from a band: "It’s like, y’know, cool to be…like…the first on stage, and y’know we’re kinda like always on the move, y’know, like…’cause we believe like we’re lucky to have this opportunity, y’know, it’s real cool… " Obviously they have reached a peak in oral brilliance. A potency in expression the size of the nation !
If you add to that gems such as "He must have drank too much.", or "Thats what I want!", or "Its great to know that...", you understand why the French are — supposedly — trying to salvage whatever is left of their beloved language. "There’s a lot of people" instead of "There are…" certainly places the American language ahead of any kind of competitor in terms of speed and efficiency, in just the same way as one says "Problem is… Fact is… ". Why bother with articles? It's too tiring. Same thing with prepositions : "We’re talking politics." Instead of "We're talking about politics." And, to top it all, no verbs anymore! " You been long. You a doctor ?"
The pathetic use of current American English sounds like a sign of decadence. And even though being decadent is so chic, one should not forget that mistreating language is step One to the relinquishment of basic values. How could one expect to lead the world when "Globish" becomes the standard and when civilized English is set aside as an old rag? Perhaps Americans should turn off their computers and turn their eyes to books again. According to the latest statistics, Americans don't read anymore. Literature? Ugh!
Do you remember William Safire’s chronicles ? Its — oops! — It's about time the Language Maven stroke again! Otherwise language will become so poor that it will reflect negatively on the very image America wishes to convey.
GENESE D'UN ROMAN
Seriland est une nouvelle version plus complète de mon roman Tiburon, publié en 1996.
Yves Berger, directeur littéraire des éditions Grasset, avait voulu le publier en 1992, mais le comité ne lui avait pas octroyé l’unanimité. Il m’avait alors encouragé à lui proposer un autre livre. Mais ne voulant pas écrire pour ne rien dire, j’ai laissé passer le temps… Et puis en 1996, le roman est sorti, mais au fil des années cette première édition me laissait insatisfait : il y manquait “quelque chose”.
Il m’aura fallu vingt ans pour retravailler cette histoire au corps et lui trouver une continuité actuelle. C’est ainsi que l’histoire se déroule en deux temps : Premier voyage, en 1985, et Second voyage, en 2015, trente ans plus tard. Mais les deux périodes sont enfin reliées par un fil narratif solide. C’est donc une double aventure proposée aux lecteurs et lectrices.
À la fin des années 80, J.M.G. Le Clézio enseignait dans la même université que John Skolle, à Albuquerque, Nouveau-Mexique. Il m’avait encouragé à parler du Seriland, qu’il connaissait lui-même assez bien. Lorsque nous nous sommes vus en 2018, Le Clézio m’a dit qu’il avait délaissé les États-Unis pour la Chine, ne se reconnaissant plus dans l’Amérique actuelle, mais c’est là mon interprétation de ses paroles. Le point commun entre lui et John Skolle est assurément un regard critique sur ce pays, mais aussi un intérêt affectif pour le peuple dont il est question dans mon livre. Peu d’auteurs ont écrit sur cette région sauvage. Seriland ajoute un caillou supplémentaire sur la piste littéraire de ce pays magnifique et dangereux à la fois.
Phil Skolle